Les étudiants caennais se sont réunis pour dénoncer leurs conditions de vie précaires, mardi 12 novembre à midi. Tim, étudiant à Caen, pense être parmi "les plus chanceux". Pourtant, il n’arrive pas à joindre les deux bouts. Rencontre.
"La précarité tue". C'est l'inscription que l'on peut lire sur un drap blanc, tendu devant le restaurant universitaire du campus de Caen (14), ce mardi 12 novembre à midi. Ils sont une cinquantaine réunis en soutien à l'étudiant lyonnais, qui a tenté de mettre fin à ses jours vendredi 8 novembre. Devant le Crous de l'université Lyon 2, le jeune homme de 22 ans, s'est immolé par le feu en raison de ses conditions de vie précaires.
Reportage d'Amandine Pinault et Jean-Michel Guillaud
"Des étudiants s'en sortent en mendiant, en proposant des services, en travaillant sans être déclarés", assistante sociale à l'université de Caen
Parmi les étudiants caennais, Tim (un prénom d'emprunt) écoute attentivement les discours des représentants du Syndicat Solidaires et Sud éducation, qui ont appelé au rassemblement. Son sac de cours en bandoulière, Tim est en troisième année de licence en mathématiques. Rien ne laisse penser qu'il rencontre des difficultés financières. Il s'en persuade lui-même : "je fais partie des étudiants les plus chanceux".
30 euros de découvert le 12 du mois
Pourtant, le compte bancaire du jeune homme prouve le contraire. Il a déjà 30 euros de découvert ce mardi 12 novembre. L'étudiant de 21 ans n'a pas obtenu de logement en résidence universitaire, par manque de place.Il occupe donc un studio, dont le loyer s'élève à 400 euros par mois. Ses ressources ? 170 euros mensuels d'APL (Aide personnalisée au logmement) et 160 euros de bourse. Mais depuis deux mois, Tim n'a pas eu de versement de la part du Crous, en raison d'une "erreur administrative". Il ne vit qu'avec les APL et l'argent qu'il a gagné pendant son job d'été. "J'ai honte, je n'ose pas demander de l'aide à mes parents", explique Tim, le regard fuyant. Le jeune homme connaît leur situation financière. Son père et se mère sont rémunérés au SMIC.
Des astuces pour (sur)vivre
"Je ne mange pas le midi", confie honteusement l'étudiant en baissant les yeux. Il reconnaît que les tarifs du restaurant universitaire sont trop élevés : "trois à quatre euros pour un repas, ça coûte cher !".Alors le jeune homme a développé plusieurs stratégies afin de manger pour trois fois rien. Il n'achète que les produits les moins coûteux comme les pâtes et le riz et il se procure des aliments en gros pour mettre en commun avec ses camarades. Il utilise aussi l'application Too good to go. Elle permet aux grandes surfaces et aux petits commerces de proposer des produits sur le point d'être périmés à moindre coût.
"Je mange beaucoup de pâtes et de riz en très petite quantité, pour économiser. Mais souvent, j'ai faim", Tim 21 ans, étudiant en mathématiques à l'université de Caen.
Une situation "déchirante"
Logé à une demi heure de la faculté, Tim ne peut se passer des transports en commun. Mais l'étudiant avoue frauder : il n'a pas les moyens de payer chaque mois un abonnement. Autre dépense à prendre en compte : le forfait téléphonique. Il s'élève à dix euros par mois, mais à ce prix là, l'accès à internet est très limité. "Pour étudier, c'est compliqué", constate Tim, condamné à se déplacer jusqu'à l'université pour avoir une connexion.Passionné par ses études, Tim se trouve dans une situation "déchirante". "Si dans un ou deux mois, je ne trouve pas de job étudiant, je vais être obligé d'arrêter mes études", constate amèrement le mathématicien en herbe.